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Différentes façons de télétravailler...

Le télétravail fait partie des mesures-phare de la panoplie dont dispose les entreprises modernes pour répondre aux nombreux défis de demain. Le télétravail a cependant deux facettes.

Côté face, des opportunités dans de très nombreux domaines qui peuvent faciliter et accélérer la transition vers l’entreprise du futur. Côté pile, un potentiel tout aussi important de générer des problèmes si l’approche n’est pas considérée à sa juste importance et mise en place correctement. Le télétravail, c'est des opportunités pour les entreprises et les salariés, mais aussi des écueils à identifier et éviter. C'est probablement une des raisons qui ralentit une mise en place inéluctable d'un télétravail moderne et dynamique en support à une politique humaine indispensable au bon fonctionnement de l'entreprise.


Le télétravail est une mesure qui a du sens financièrement, qui est environnementalement bénéfique, socialement désirée par une grande partie des salarié(e)s et une réponse élégante aux problèmes sociétaux que nous connaissons et qui risquent d'encore s'amplifier dans les années à venir. Qui peut citer une mesure, qui, prise correctement et sérieusement, rempli ces quatre dimensions avec autant de potentiel pour l'entreprise ? Il est certain que les modes de travail incluant le télétravail évoluent et évolueront encore pour devenir incontournables. De fait, la question du "si" ne se pose plus, mais plutôt celle du "quand" et surtout du "comment". En effet, même si le télétravail se démocratise et se diversifie, la situation reste loin des attentes puisque deux tiers des actifs désirent pouvoir télétravailler et seulement un quart y ont réellement accès.

Reflétant cette évolution dynamique des modes de travail, on peut noter que le vocabulaire autour du télétravail s'est diversifié et précisé durant ces derniers mois. A ce stade, ce vocabulaire, plus riche, peut créer une certaine confusion. Il existe dorénavant différents types de télétravail dans l’entreprise, ce qui est bien, mais aussi différents termes pour désigner un même mode de télétravail. Essayons d'y voir plus clair.


Télétravail « pendulaire »

Ce terme est actuellement utilisé dans seulement 7% des accords sur le télétravail que l’on trouve sur Légifrance. Il s’agit d’un terme potentiellement trompeur, même s’il a beaucoup de sens une fois expliqué. Bien entendu, il ne signifie pas que le télétravailleur doit garder un œil en permanence sur la pendule. Le télétravailleur alterne « en permanence » entre deux lieux de travail : son site de rattachement et son domicile, comme le balancier d’une pendule.


Télétravail régulier

Synonymes : Télétravail fixe, ou « pendulaire hebdomadaire » ou périodique ou partiel ou partiel régulier.

Le terme de télétravail régulier est l’un des plus utilisés avec 27% des accords qui définissent ce terme dans l’entreprise. Un terme comme « périodique », même s’il est parlant, n’est utilisé, lui, que dans 0,3% des accords publiés à la date.

Le terme « pendulaire hebdomadaire » n’est que peu utilisé. On ne le trouve que dans l’accord de la Caisse d’Assurance Retraite et de la Santé au Travail du Nord-Est. Même si c’est une expression très parlante et tout à fait correctement définie dans le texte de cet accord, on pourra lui préférer le terme de télétravail régulier, moins "technique".

Dans ce mode, les journées de télétravail sont typiquement d’une ou deux journées fixes par semaine. Le nombre (1 ou 2 jours) et les journées concernées par le télétravail sont fixées d’un commun accord entre le collaborateur et son manager. Il arrive que des accords stipulent que ce type de télétravail soit assorti d’une exigence d’un nombre minimum de jours de présence sur le site de rattachement.

Quand elle existe, et par expérience, cette clause peut être assez délicate à gérer. En effet, par exemple, Pierre désire travailler deux jours par semaine et obtient l’accord de son manager pour télétravailler le mardi et le mercredi chaque semaine. Par contre, l’avenant au contrat de travail de Pierre stipule qu'il doit être présent au minimum trois jours sur son site de rattachement. Les semaines où Pierre est en déplacement professionnel sur une journée, ou prend un jour de congés ou est absent pour maladie durant un jour, il doit établir avec son manager quel est le jour (mardi ou mercredi) pendant lequel il sera présent sur le site de rattachement au lieu de télétravailler.

La difficulté est, bien entendu, que si une semaine se déroule normalement, Pierre télétravaille comme convenu. Mais s'il tombe malade le vendredi, le contrat de travail n’est en théorie pas respecté. On introduit donc une contrainte potentiellement louable (s'assurer que le lien présentiel reste fort), mais un peu rigide qui fait que respecter à la lettre l'avenant peut être un casse-tête voire impossible. A ceux qui disent "oui, mais il faut rester souple", on peut répondre "elle sert à quoi, alors, la clause d'obligation de présence sur site ?". Si on veut vraiment enfoncer ce clou, on peut écrire quelque chose d'équivalent, mais réalisable sans trop d'efforts, du genre "en dehors des jours de télétravail, de déplacement, de congès et de maladie, le/la salarié(e) doit être présent(e) sur son site de rattachement selon les conditions définies par le règlement intérieur."


Le télétravail occasionnel

Synonymes : Télétravail ponctuel ou irrégulier ou partiel

C’est un type de télétravail qui tente de répondre à un besoin ponctuel du salarié (retour de long voyage, petit rhume sans gravité qui n'empêche pas de travailler [mais on veut éviter de contaminer les collègues], …). C’est un mode assez libre qui peut être pris rapidement en accord avec la hiérarchie et qui demande de la souplesse d’organisation et de la confiance. La version plus structurée est le télétravail forfaitaire (que nous verrons plus loin).

Il peut être noté au passage que ce type de télétravail était écarté dans les textes d’origine puisque l’European Framework Agreement on Telework publié en juillet 2002 définit le télétravail ainsi : « Le télétravail est une forme d'organisation et/ou de réalisation du travail, utilisant les technologies de l'information, dans le cadre d'un contrat ou d'une relation d'emploi, dans laquelle un travail, qui aurait également pu être réalisé dans les locaux de l'employeur, est effectué hors de ces locaux de façon régulière». Une preuve supplémentaire que la notion de télétravail s’assouplit pour répondre aux besoins des employés et des entreprises au fil des années. D'ailleurs, la définition française du télétravail, datant de mars 2012 est déjà plus souple (Article L1222-9 du code du travail) puisqu’elle définit ce mode de travail par : « Le télétravail désigne toute forme d'organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l'employeur est effectué par un salarié hors de ces locaux de façon volontaire en utilisant les technologies de l'information et de la communication ».


Le télétravail exceptionnel

Synonymes : Télétravail occasionnel (potentiellement regroupable avec le mode décrit ci-dessus)

Pour faire face à des situations inhabituelles ou d’urgence (conditions climatiques exceptionnelles, indisponibilité des moyens de transport, pandémies…). Le salarié exerce son activité, sous réserve que celle-ci s’y prêtent, depuis son domicile. Le télétravail exceptionnel ne fait habituellement pas l’objet d’un avenant au contrat de travail. Il est usuellement géré grâce à une charte et se déclenche par:

  • un simple accord du manager (par mail ou autre moyen « rapide »),

  • un accord implicite et permanent de télétravailler « automatiquement » dans des situations clairement définies et bornées dans le temps (intempéries générant une alerte orange ou rouge, un arrêté préfectoral militant la circulation, …)

Les deux cas peuvent être qualifiés « d’exceptionnels », même s’ils diffèrent dans leur traitement. . Rares d’ailleurs sont les entreprises qui poussent la logique jusqu’à ce déclenchement « automatique », y compris dans le cas d’intempéries ou d’arrêté préfectoral (pour les pics de pollution).

Il y a fort à parier que la "mise en place automatique" deviendra une mesure plus répandue quand les entreprises expérimenteront -il suffira d'une fois- que la procédure de demande d’accord est mal adaptée aux cas d’urgence. Pour de nombreuses raisons, ce type de déclenchement est intéressant au niveau autonomie dans un cadre défini et responsabilisation dans les situations à risque.


Le télétravail forfaitaire

Synonymes : « pendulaire forfaitaire » ou partiel (si, si, encore une fois…) ou occasionnel.

Le terme tout aussi parlant de « pendulaire forfaitaire » est utilisé à nouveau par La Caisse d’Assurance Retraite et de la Santé au Travail du Nord-Est. Il correspond à un nombre de jours de télétravail répartis en accord entre le télétravailleur et son manager sur un mois ou sur une année sans forcément qu’il repose sur une périodicité établie comme en télétravail régulier.

Cette option peut être assortie d’un nombre minimum de jours de télétravail. De même des règles supplémentaires peuvent exister comme l’interdiction de ne pas prendre les cinq jours d’une même semaine, de prendre 1 ou 2 jours par semaine (avec un plancher mensuel de 4 jours, et un plafond mensuel de 8 jours), etc.

Exemple : Le nombre de jours de télétravail sur un mois ne pourra être inférieur à 4 jours et ne pourra excéder 10 jours.

Exemple : Un forfait annuel (année civile) de 21 jours télétravaillés. Il est impossible de reporter ces jours de télétravail d’une année sur l’autre. Les jours de télétravail pourront être pris à raison de quatre jours/mois maximum dans la limite du forfait annuel de 21 jours Seuls deux jours consécutifs maximum sont autorisés.



Le télétravail à temps plein

Synonymes : Télétravail permanent ou remote

Ce mode consiste, tout simplement, à réaliser 100% du temps de travail du salarié en télétravail. Il peut être accordé quand le lieu d’habitation du salarié se situe en dehors de la région de son site de rattachement (lieu de travail contractuel). Dans un tel cas, il est encore plus important de s’assurer que le domicile du salarié présente des conditions favorables au télétravail (espace, confort, connexion, etc.).

De nombreux accords (ou pratiques) compensent également la perte du lien avec l’entreprise et l’équipe dans cette situation en introduisant des temps forts de rencontre réguliers pour les équipes. C'est un premier pas, mais au plus on télétravaille, au plus on se coupe, volontairement ou pas, du collectif. De fait pour garder un lien, il faut déjà l'avoir créé... Car les liens doivent être forts (et agréables) avec l'entreprise, le manager, les collègues, les membres projet si on veut pouvoir les cultiver à distance sans trop y rechigner. En clair, l'entreprise doit avoir un accueil de qualité (on-boarding) et pas un bête site web détaillant des procédures RH libellé "intégration" ou "bienvenue chez nous", avoir un management ouvert, moderne, humain, des formations régulières de connaissances de l'entreprise (en soft skills et hard skills) pour développer la fierté d'appartenance, des valeurs partagées, des communication valorisantes, etc.


Le télétravail pour raison médicale

Dans ce cas, le salarié a la possibilité de solliciter une période de télétravail pour une durée déterminée lorsqu’il se trouve dans l’incapacité temporaire de se rendre dans les locaux de l’entreprise pour une raison liée à sa santé. Le recours au télétravail à durée déterminée, est potentiellement réservé à des circonstances spécifiques comme :

Une préconisation thérapeutique du médecin du travail,Une immobilisation temporaire du salarié pour une durée variable à fixer, Pour accompagner une grossesse difficile.…


Le télétravail pour limiter les arrêts maladie

Pour rappel, nous avons vu que le premier ministre a annoncé à BFM le 14 novembre 2018 que le gouvernement étudie le recours au télétravail pour les salariés ne pouvant se rendre à leur bureau pour des motifs de santé et qui seraient en mesure de (re)travailler à leur domicile, et ce pour limiter la durée des arrêts maladie.


Conclusion

De nombreux accords, définissent désormais assez précisément différents types de télétravail. Ce vocabulaire est loin d’être stabilisé.

Le travail multimodal, nomade, est aujourd’hui une réalité grâce aux progrès de l’informatique. Le télétravail, par son impact fort sur les relations humaines doit être approché par l'entreprise comme une révolution feutrée, mais réelle. Il se démocratise, se diversifie et se précise. Les entreprises et organisations publiques qui l'adoptent font souvent preuve d'une belle créativité. Même si cela peut sembler paradoxal, le télétravail est l'occasion à saisir de revisiter les fondamentaux du "travailler ensemble". Car la préparation personnalisée, accompagnements, études d’impacts, la confiance, les formations, et la qualité managériale de l'entreprise sont les clefs du succès.


 Merci. Images Freepik (Luis Molinero, Yanalya et Creativeart [Titre])

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